Les Breizhiliens sous le Tropique : San Pedro de Atacama / Salta – 12/11 au 27/11
San Pedro de Atacama : après l’effort, le réconfort
Après le Sud-Lipez, San Pedro est une oasis paisible et agréable au milieu du désert d’Atacama, l’un des plus arides au monde. En arrivant, nous retrouvons Dan, Gina et leurs fatbikes. Mais nous apercevons également un tandem avec un drapeau bien familier : le gwen ha du. A défaut de pouvoir nous accueillir, le warmshower de San Pedro nous indique un camping parfait pour se remettre du Sud-Lipez. Avec Sandrine et Florent, nos jeunes mariés en tandem autour du monde, nous partageons notre désir de bien manger. Barbecues, pizzas maison et bien sûr crêpes sont de la partie. Nous goûtons également au vin sud-américain pour fêter la naissance de notre nièce Luisa, née pendant la traversée du Sud–Lipez.
Une des particularités du désert d’Atacama est la clarté de son ciel, ce qui lui permet d’accueillir les plus gros télescopes du monde. Nous en profitons pour faire une visite astronomique qui, malgré l’absence de planètes, nous aura permis d’observer quelques merveilles de notre ciel. Nous y avons également découvert une application (google skymap) qui permet de se repérer dans le ciel.
Nous rencontrons également un autre couple de cyclistes, non pas espagnol mais du pays basque (espagnol) : Aritz et Etsy. Notre dernier jour sera l’occasion de retrouver Louise, Baptiste et Bertrand (rencontré à la Casa de La Paz) et une cycliste suisse : Christine.
San Pedro de Atacama – Col à 4780m
Autant aller à San Pedro c’est une partie de plaisir, autant remonter les 42km, soit 2000m de dénivelé positif, nous fatigue rien que d’y penser. Comme une majorité des cyclos empruntant le paso Jama pour se rendre en Argentine, nous décidons de faire du stop. Après seulement 45min, une jeep s’arrête et nous propose de nous amener jusqu’à la frontière bolivienne à 4600m. Le chauffeur nous demande combien notre conscience est prête à payer. N’ayant plus que 30000 pesos, nous proposons 20000. Il nous répond « Non, non, 10000 ! ». Bon ben OK pour 10000 !
La montée est immense et semble interminable. C’est alors qu’à mi-parcours nous croisons un homme qui la grimpe en courant et en poussant une charrette. Il s’agit de Jamie (http://jamieisrunning.com/), il court de Vancouver jusque Buenos Aires. Il fait des étapes aussi grandes qu’un cyclotouriste en courant 2 marathons par jour. Il est incroyable !
La reprise est un peu difficile avec l’altitude mais le vent dans le dos et la vue sur les lagunes verte et blanche nous aident pas mal. Puis nous passons devant une autre lagune, un salar et des vigognes. Les véhicules croisés nous encouragent. Le moral est au top mais à 18h, en montée et le vent de face, Kristell faiblit. Vers 19h30, nous atteignons le col. Kristell est à bout, congelée, frissonnant de tous ses membres, un peu plus et on la perd. Impossible d’entamer la descente. Fabien monte la tente à 4780m, avec un vent puissant et sans abri. Il donne un sac de couchage à Kristell pour qu’elle puisse se réchauffer et gère le reste.
On est loin du confort du matin : en plein soleil où on se prélassait en prenant notre petit déjeuner et en jouant avec le chiot du camping. Toute la nuit, le vent a soufflé fort et ne s’est jamais calmé. Les arceaux de la tente en gardent une bonne cicatrice. De plus, nous étions proches de la route et les poids lourds nous ont klaxonnés toute la nuit.
Col à 4780m – Frontière Jama
Après une nuit peu reposante, nous reprenons la route. Le vent souffle toujours aussi fort, même si un virage nous abrite parfois un peu. Le vent est tellement fort que Fabien pulvérise le record de vitesse avec une pointe à 100,6 km/h, ce qui lui permet de doubler les camions ! Aujourd’hui, le vent est un allié incroyable : nous grimpons les côtes à 30, voire 40 km/h sans pédaler et nous faisons les 65 km qui nous séparent de la frontière argentine en 3h (pauses incluses).
Mais voilà, une fois n’est pas coutume, nous arrivons juste après un bus de touristes. Il nous faudra alors plus d’une heure pour obtenir les quatre tampons nous ouvrant les portes de notre dernier pays (délai en grande partie liée aux agents aux frontières qui ont disparus au milieu des formalités).
Nous décidons de nous arrêter manger à la station-service de la frontière de Jama car on peut y payer par carte bancaire (et oui, nouveau pays, nouvelle monnaie… que nous n’avons pas encore !). Pendant ce temps, le vent est devenu très très fort. Il est même difficile de marcher dans la rue et 50 km dans le désert, vent de côté, nous attendent. On décide de se garder ça pour demain et de dormir derrière la station-service qui nous met à disposition une maison abandonnée.
Frontière Jama – Susques
On a bien fait d’attendre car ce matin il n’y a pas trop de vent et le peu qu’on a est toujours un peu dans notre dos. Il y a peu de circulation mais beaucoup de motards. La route longe ou traverse plusieurs salars nous offrant de très beaux paysages.
A midi, nous nous arrêtons à un office du tourisme situé au milieu de rien, mais avec une très bonne connexion Wifi. Nous y rencontrons une famille française voyageant en camping-car depuis 4 ans (http://cavagnis-tour.com/).
Nous traverserons deux fois le Tropique du Capricorne aujourd’hui. Dans l’après-midi, le vent se renforce, soulevant devant nous des nuages de poussière rouge. Nous attaquons une petite montée, vent dans le dos, puis une très longue descente sur une route longée par des troupeaux de lamas. Il faut s’accrocher au guidon pour ne pas être déstabilisé par le vent. Nous arrivons à Susques avant 17h. Il nous aura donc fallu environ 6h30 de vélo pour parcourir 117km.
Susques est un village sans grand intérêt où les habitants semblent avoir bien fêté l’élection de leur nouveau président.
Susques – Cuesta de Lipan
La journée démarre par une grosse côte en lacets à la sortie de la ville. Puis on alterne montées et descentes avec le vent parfois de face, de dos ou latéral et on ne sait jamais de quel côté il va venir. Les paysages sont magnifiques. Nous parcourons un canyon rempli de cactus, comme dans les films américains. La suite de la journée s’annonce plus calme : grandes lignes droites planes puis une côte de 700m de dénivelé pour rejoindre le village de Tres Pozos. Sur ces indications du GPS, nous décidons donc d’aller jusque Tres Pozos pour y dormir.
Après avoir traversé les grandes lignes droites des salinas au milieu des ânes, nous arrivons à Tres Pozos à l’heure du déjeuner sans avoir rencontré la moindre montée. Nous sommes agréablement surpris et décidons de poursuivre notre chemin malgré le vent qui se renforce.
C’est finalement en fin d’après-midi que nous nous arrêtons au pied de la route qui commence gentiment à grimper (une montée non prévue par notre GPS). Nous bivouaquons dans un endroit très tranquille, en contrebas de la route où nous ne sentirons quasiment pas de vent de toute la nuit.
Cuesta de Lipan – Tumbaya
Le GPS ne nous annonce pas une journée trop difficile : plat et grande descente. Sauf que voilà, la route semble monter tranquillement mais sûrement. Puis, au détour d’un virage, un mur se dresse devant nous qu’une route en lacets permet de le franchir. Nous sommes au pied de la Cuesta de Lipan. La surprise est grande et attaque un peu le moral de Kristell qui, tout en continuant à grimper, décide de faire du stop. Alors qu’il ne reste que 400m de dénivelé à monter, une première voiture passe. Kristell tend le pouce sans trop de conviction. Deux minutes plus tard, elle grimpe la côte à bord d’une jeep qui la déposera au sommet. Fabien, lui, refuse la facilité. Il finit sur son vélo et arrivera seulement 12min plus tard.
Vers 10h30, le vent se lève, mais il n’est pas trop gênant pour la méga descente qui nous attend. On file à toute allure au milieu des montagnes de toutes les couleurs. On voit des montagnes rouges, jaunes, marrons et même bleues !
Nous nous arrêtons déjeuner à Purmamarca. Après plusieurs jours de paysages désertiques à haute altitude, c’est un plaisir d’arriver dans ce petit village vert et ensoleillé. On pourra y trouver légumes et fruits frais. On profite bien de notre pause déjeuner. Mais pas le temps de s’éterniser car on souhaiterait se rapprocher le plus possible de Jujuy. Cependant, lorsque nous récupérons la route 9, il y a un fort vent de face. On peine à faire du 11 km/h alors que ça descend. Sur cette route, il y a énormément de trafic et pas de bande d’arrêt d’urgence. On en a vite marre et on décide de s’arrêter dès que possible plutôt que de s’épuiser dans ces conditions.
C’est au petit village de Tumbaya que nous nous arrêtons. L’office du tourisme (et oui, en Argentine, il y a des offices du tourisme partout) nous informe qu’il n’y a qu’un hôtel chic. Finalement, nous trouverons une cour où poser notre tente, avec une cuisine à disposition et de l’eau chaude. Le propriétaire nous informe qu’ici le vent ne stoppe jamais et qu’il est souvent de sud. Nous verrons bien demain. Pour le moment, l’après-midi rime avec repos et pain perdu.
Tumbaya – El Carmen
Encore une fois, on a bien fait de s’arrêter là hier. En plus d’avoir passé une après-midi très reposante, le vent ce matin a faibli et c’est un vent de nord (et donc dans notre dos). On alterne montées et descentes et malgré la chaleur les kilomètres défilent vite. Puis nous entamons une énorme descente dans la vallée sur une trois voies, avec une vue grandiose sur les montagnes qui entourent la rivière que nous allons longer.
Pour le déjeuner, nous atteignons Jujuy. C’est dangereux car il y a beaucoup de circulation. Nous empruntons une 2×2 voies dont une portion est en construction ce qui nous permet par moment d’être seuls sur une voie. Nous déjeunons à la station-service où nous sommes rejoints par Chris, un cyclotouriste anglais rencontré à La Paz et déjà croisé dans la matinée. Il a suivi un tout autre itinéraire que nous en Bolivie.
Sortir de Jujuy est également dangereux et la départementale menant à El Carmen est très fréquentée. Le point d’information touristique nous indique le chemin pour le camping municipal. Les commerçants sont super sympathiques.
Au camping, nous retrouvons Chris, nous rencontrons des argentins qui nous offrent du thon, un couple allemand qui voyage 100 jours dans un van et enfin un cyclotouriste sud-américain qui a besoin de notre pompe car il a crevé. Nous le surnommons Rastarocket car il carbure aux joints. Il nous en proposera d’ailleurs un pour nous remercier, nous le déclinons.
El Carmen – Salta via la route des corniches
Aujourd’hui, nous roulons dans la campagne argentine. On pense à la Bretagne, même si des montagnes composent l’arrière-plan. Nous prenons une route étroite et vallonnée. Après une belle vue sur la lagune, nous attaquons une grosse montée. Les véhicules nous encouragent et font attention à nous. La montée se poursuit avec un pourcentage raisonnable. Nous sommes accompagnés par des milliers de papillons.
Nous traversons une forêt mais malgré l’ombre apportée nous roulons sous 42°C. Le chemin que nous empruntons s’appelle la route des corniches. Au détour d’un virage, nous sommes rattrapés par Frank, un cyclotouriste allemand rencontré à La Paz. Quelques minutes plus tard, nous voyons Rastarocket pousser son vélo car il a encore crevé. Nous lui donnons de l’eau et nous reprenons notre route.
Lors de la pause déjeuner, il nous redouble mais sur son vélo ce coup-ci. Il n’a pas baissé les bras et roule sans chambre à air, sur la jante. Mais voilà, nous le rattrapons vite et le découvrons accroupi au bord de la route semblant se laisser envahir par le désespoir. Le temps se couvre. Après quelques kilomètres, le temps lourd laisse place à une forte pluie. On s’équipe de nos vêtements de pluie et qui est-ce qu’on voit dans nos rétroviseurs ? Rastarocket ! Il s’arrêtera aux sources d’eau chaude où beaucoup d’argentins font des barbecues et nous, nous continuerons vers Salta par une grosse montée puis l’autoroute. Après quelques kilomètres et des freins faisant un boucan infernal, nous apercevons une piste cyclable sur notre gauche.
Il est difficile de s’orienter dans la ville mais nous finissons par trouver une auberge dans le centre. Les prix ont bien grimpé, mais avec le blue market (ou dollar blue), on est dans le budget.